Si le sevrage artificiel constitue très souvent un stress pour le poulain séparé trop tôt de sa mère, des solutions existent pour diminuer l’anxiété du jeune équidé. Voici quelques pistes sur comment sevrer un poulain dans de bonnes conditions et contribuer ainsi à un meilleur développement de sa personnalité sur la durée.
Le sevrage progressif
Dans son milieu naturel, un poulain reste auprès de sa mère jusqu’à ce qu’elle mette à nouveau bas, c’est-à-dire entre 10 et 12 mois. Les liens entre une mère et son poulain sont très forts et, s’il n’y a pas de nouvelle mise à bas, la jument peut allaiter jusqu’à 2 ans. Lorsqu’un nouveau poulain naît, le premier poulain reste parfois très longtemps avec sa mère dans le troupeau. Il n’y a pas de rupture.
En élevage, il est souvent difficile de respecter ces conditions. La pratique du sevrage artificiel est très courante, et les effets souvent méconnus ou ignorés. Un poulain brutalement séparé de sa mère peut perdre du poids, devenir plus sensible aux maladies, prendre des tics… Le sevrage artificiel, généralement entre 5 et 7 mois, constitue en effet une grande source de stress pour le poulain comme le montre l’étude conjointe de l’INRA de Nouzilly et de l’Ifce*.
Présentée lors de la 4ème Journée d’information en Éthologie équine 2017, cette étude récente met en avant les bénéfices du sevrage progressif par rapport au sevrage brutal où le poulain est subitement arraché de sa mère.
Ont ainsi été étudiés deux groupes de poulain : un où les poulains ont subi un sevrage progressif, un autre un sevrage brutal à 6 mois.
Déroulement du sevrage progressif
A partir du 5ème mois, les poulains sont séparés 15 minutes de leur mère par une simple barrière à claire-voie. Les périodes de séparations sont augmentées quotidiennement. La veille du sevrage définitif, les poulains sont séparés de leurs mères toute la journée et ne peuvent donc pas téter.
Résultats de l’étude
Le sevrage brutal constitue un stress bien plus intense que le sevrage progressif. Cela se remarque à tous les niveaux : comportemental, microbiote intestinal et physiologique.
Ainsi, les poulains qui n’ont pas vécu cette très mauvaise expérience de vie précoce :
- hennissent deux fois moins au moment du jour ‘J’ (15 hennissements/heure contre 40) et trottent 3 fois moins,
- sont moins peureux envers l’homme, moins grégaires, moins actifs, moins peureux en général et plus curieux,
- développent une personnalité moins anxieuse et plus calme.
Le stress intense du sevrage brutal impacte pour toute sa vie la personnalité du jeune cheval qui se met en place progressivement dès le plus jeune âge, comme chez l’homme.
Si les effets du sevrage brutal ont moins d’impact sur les mères au niveau comportemental à long terme, les juments qui ont subi un sevrage progressif sont moins stressées le jour J.
Sevrage : règles de bons sens…
Bien qu’il n’y ait pas de méthode universelle en matière de sevrage de poulain et jument, suivre les règles établies par les études sur le sujet permettent de réduire le stress pour les animaux mais aussi pour les personnes qui gèrent le sevrage. Cela aura également une influence sur le comportement du cheval et favorisera sa future collaboration avec son propriétaires. Pour résumer :
- âge minimum de sevrage d’un poulain : 6 mois,
- sevrage progressif,
- sevrage derrière une barrière,
- sevrage par paire ou en groupe au paddock,
- transition alimentaire riche en matières grasses et fibres,
- introduction de chevaux adultes dans les groupes de poulains, etc.
*’Effets du stress induit par le sevrage sur les indicateurs comportementaux, physiologiques et transcriptomiques : analyse comparative d’un sevrage progressif et d’un sevrage brutal’ – Léa Lansade, Aline Foury, Fabrice Reigner.